Combien de temps le déluge a t-il duré ?
Cela fait quelques temps que je pense à Noé. Alice m'a fait lire plusieurs versions de l'histoire de Noé dans des livres pour enfants récemment, et je viens de relire ce récit biblique dans ma propre Bible, quelque part vers le début de la Genèse, finalement assez peu de temps après le début de l'histoire de l'humanité. Comme on peut rapidement gâcher tout ce que Dieu nous a donné ! Cette histoire est tellement pittoresque qu'elle est une source remarquable de prduits dérivés pour les petits enfants, y compris dans le monde séculier : nos filles ont eu un tapis d'éveil représentant Noé, son arche et tous ces couples d'animaux, nous avons également un grand bateau en plastique avec Noé sa femme et un couple de lions, de girafes et d'éléphants. Bref, c'est une histoire folklorique amusante à raconter aux tout-petits, dont la vraisemblance nous semble quelque peu improbable étant donnée la biodiversité qui nous entoure.
Et pourtant, n'y a-t-il pas des mines d'enseignements à en retirer ? Si je la lis jusqu'à mes 99 ans, n'y trouverai-je pas encore et toujours de nouvelles leçons à appliquer pour ma propre vie ?
Je souhaite donc m'arrêter sur celles qui m'ont frappées ces derniers jours, sans en refaire une lecture exhaustive ni une étude approfondie.
Tout d'abord, je dois reconnaître que je porte à ce barbu de quelques centaines d'années une admiration réelle. Il vivait dans un monde qui ne reconnaissait pas Dieu et qui avait perdu tous ses repères. Personne n'honorait Dieu à l'époque. Et pourtant Noé a su tenir ferme dans sa foi, et même élever ses propres fils dans la crainte de Dieu. Si je me retrouvais dans sa situation, pourrais-je être fidèle dans ma foi envers Dieu ? Si je vivais dans un monde de crapules où seul compte mon bénéfice personnel, saurais-je être intègre et honnête ? Saurais-je transmettre mes valeurs à mes enfants, sans avoir personne autour pour m'encourager ? Alors évidemment, quand il a commencé à construire son immense paquebot au beau milieu de la terre ferme, il a dû s'attirer pas mal de railleries. Mais en réalité il vivait déjà en total décalage par rapport aux gens de son temps. Ne pas aller dans le sens du vent et ne pas tenir compte des moqueries devait déjà être un style de vie pour lui. J'imagine à quel point cet homme devait révérer son Dieu pour garder le cap dans le monde qui l'entourait, et pour ne pas penser que c'était Dieu qui se moquait de lui lorsqu'il lui a demandé de construire l'arche. De mon côté, est-ce que j'ai une telle proximité avec Dieu que, s'il me demande de faire des choses me paraissant farfelues, j'aie confiance en sa parole, et j'aie le désir de lui obéir, en croyant qu'il me fait marcher dans un chemin qui est bon pour moi ?
Bon voilà , c'est une première réflexion,mais tout le monde a déjà réfléchi et parlé sur la foi de Noé. Le deuxième aspect qui m'a frappée dans ma lecture cette fois était le notion de l'épreuve et de sa durée. Chacun a en tête qu'il a plu pendant 40 jours et 40 nuits, de sorte que la Terre a été totalement recouverte d'eau. Quand des pluies torrentielles s'abattent, et qu'il faut attendre que l'orage passe, le temps peut paraître très long, alors on imagine aisément que 40 jours et 40 nuits de pluies diluviennes sans discontinuer aient semblé très longs. Et après cela, revoilà le soleil. Et alors, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes ? Bien sûr que non ! L'orage a passé, certes, mais la vie ne peut pas reprendre son cours normal. Avant que les eaux ne baissent vraiment, il faudra encore une période longue, bien plus longue que celle de l'épreuve à proprement parler, et finalement encore plus incertaine, avant que Noé et sa famille ne foulent de nouveau la terre ferme. Une période faite de tâtonnements, d'oiseaux qui partent et qui reviennent, de branches d'oliviers à prendre comme des encouragements, et une telle patience... Il est étonnant de penser que le même Dieu qui avait donné des instructions aussi précises quant aux dimensions de l'arche n'ait pas été plus bavard concernant les modalités de la fin de cette épreuve. Noé s'est-il demandé alors si Dieu l'avait oublié ?
En tombant à tant de reprises sur cette histoire de Noé récemment, je me suis demandé si Dieu n'allait pas nous conduire sur un chemin où j'aurais beaucoup à puiser dans ce récit pour cheminer avec la foi de Noé. Et notamment sur cette période critique où, alors qu'il a cessé de pleuvoir, on pourrait estimer que le temps de l'épreuve est révolu, mais où on ne voit pas encore la promesse de Dieu se réaliser. Et au contraire celui-ci nous semble même être plus distant qu'avant. Au début de l'histoire on voit la foi de Noé en action, dans la construction de cette arche incongrue, mais à la fin, on peut voir une foi en attente, moins spectaculaire peut-être, mais qui doit se nourrir des promesses passées pour tenir dans la durée, et dans l'incertitude même de cette durée.
Gardons-nous aussi de penser au sujet de notre entourage que si la pluie a cessé, alors ils sont tirés d'affaire, et leur épreuve est finie. Peut-être est-ce dans cette longue attente qu'il est plus difficile d'être fidèle à Dieu et peut-être nos prochains ont-ils besoin de nous encore davantage lors de leurs périodes de convalescence qu'au milieu de la maladie ou de la disette.